À l’occasion de sa venue à Toulon en mai dernier pour une conférence*, l’architecte Nicolas Michelin nous a parlé du futur Pôle Universitaire en centre-ville, prévu d’être livré en janvier 2014 et dont il est maître d’œuvre. Cet urbaniste « avant tout » place le contexte et la dimension humaine au cœur de tous ses projets. 

Qu’est-ce qui vous a frappé quand vous êtes venu pour la première fois sur le site de la dalle des ferrailleurs ?

Les remparts avec la porte d’Italie ! Cela m’a inspiré et étonné. J’ai souhaité prolonger cette ligne d’horizon dans le projet, avec le socle et les terrasses plantées. Le côté historique, la notion d’ultra-contexte, est primordial pour moi. Un projet doit toujours partir de l’existant, c’est ça l’urbanisme. Au-delà d’un geste architectural, on nous demande la position d’un bâtiment par rapport à l’espace public, partagé.

L’architecture doit être sur-mesure ! Le meilleur critère pour juger un projet, c’est d’avoir l’impression qu’il a toujours été là selon moi. La notion d’ultra contexte est primordiale dans tous mes projets.

Qu’est-ce qui caractérise votre projet, ce qui a fait la différence au départ ?

Compte tenu des fondations, le projet était conçu pour accueillir une barre d’immeubles fonctionnelle, comme il y en a tout autour dans le secteur. Nous avons voulu casser cela et proposer un projet tout en mouvement et transparence. Trois plots vitrés et orientés différemment, reliés entre eux par des passerelles extérieures courbées ; les failles entre les bâtiments sont des fenêtres sur le paysage, avec des terrasses plantées sur le socle commun, qui unifie l’ensemble dans le prolongement des remparts. La gestion des espaces entre ici et la Porte d’Italie va être très importante.

Parlez-vous de la dimension « durable » du projet ?

Aujourd’hui, on est tous « éco-quelque chose », mais on ne sait plus très bien ce que cela veut dire. On est tous acteurs de ce qui va se passer. Ce sont les énergies naturelles qui m’intéressent avant tout. La nature est très forte, elle nous donne beaucoup d’énergie, dont nous utilisons une infime partie. Le concept de « bâtiment passif » est le pire selon moi. Ici, le soleil et le vent sont très présents et nous les avons utilisés. Nous avons notamment intégré des cheminées solaires, qui assurent une ventilation naturelle des bâtiments à 90% du temps. Ce système est un peu la marque de fabrique de l’agence et va au-delà de la réglementation ; il a d’ailleurs remporté le concours Fonds Innovation Développement Durable EPL/EDF 2012. Mais pour qu’un projet soit « durable », il faut y ajouter du culturel et de la poésie. Au-delà de l’esthétique, les projets doivent être extraordinaires pour ceux qui les utilisent ou y habitent.

* A l’initiative du CAUE du Var, présidée par Philippe Sans, sur le thème « Architecture Méditerranéenne Durable ». C’est Jacques Ferrier, maître d’œuvre du bâtiment de DCNS sur le Technopôle de la Mer, qui avait inauguré le cycle l’année dernière.

Nicolas Michelin

Architecte-urbaniste né à Paris en 1955, il fonde il y a dix ans l’ANMA –Agence Nicolas Michelin et Associés – qui réunit aujourd’hui une centaines de personnes. Auteur de nombreux ouvrages et nominé pour le Grand Prix d’Urbanisme, Nicolas Michelin reçoit en 2003 et en 2010 des mentions spéciales au prix de l’Equerre d’Argent pour Le Gymnase Europôle à Grenoble et pour l’opération Grand Large de Dunkerque. En 2011, son projet architectural est lauréat du futur Ministère de la Défense à Paris.

www.anma.fr