Entretien avec Catherine Germain, comédienne de la Compagnie L’Entreprise, François Cervantes, pour la présentation du spectacle Le Concert où elle interprète Arletti, le clown.

Comment devient-on Clown ?

..Je ne sais pas si on le devient…C’est un long travail que j’ai débuté il y a une  trentaine d’année… Le clown est toujours en devenir. C’est une perpétuelle question : qui il est ? et que vient-il faire dans la lumière ? Le clown demeure une question.
D’ailleurs, cette question existentielle est traitée dans « le 6eme jour ». Arletti vole un cartable à un conférencier fatigué qui s’est endormi au pied d’un arbre en attendant l’heure de sa conférence sur la Genèse, et elle entre dans la salle à sa place.
Arletti tente de comprendre comment en ce sixième jour l’aventure de l’homme a commencé. Et au fond le public se pose les mêmes questions existentielles, c’est pour cela que ça le fait rire.
 

Quel est votre parcours ?

Je viens de la campagne. Je jouais dans des troupes amateurs et je savais que je voulais être comédienne. J’ai été acceptée à l’école de la rue Blanche à Paris. Puis après cette formation, j’ai rencontré François Cervantes et je suis entrée dans sa compagnie.
Depuis c’est une recherche, une conversation entre un auteur et des acteurs. C’est une introspection.., et de spectacle en spectacle, dans la relation au public, on touche à des endroits vrais qui offrent à l’acteur une vraie palette de jeux.
 

Avez-vous travaillée le clown dès les débuts dans cette compagnie ?

Non… en fait oui ! Dès la 2^ème année. C’est suite à une recherche d’acteur, parce que le clown était plutôt réservé au monde du cirque.

Nous avons travaillé sur un spectacle, La curiosité des anges. François Cervantes nous a posé la question : « pourriez-vous créer un être dont vous pourriez tomber amoureux ?  Il avait l’intuition qu’il pouvait exister des personnages intemporels, qui pouvaient traverser les histoires. Il avait comme souci la notion de l’incarnation au théâtre comme dans le film de Wim Wenders « Les Ailes du désir » où les anges rêvent d’être incarnés.

Comme réponse on s’est mis à dessiner des clowns. J’ai découvert autre chose qu’un personnage, une musique en moi qui peut aller dans plein d’endroits. Cette recherche est une « errance » intérieure et j’ai traversé 6 spectacles avec ce clown. Le maquillage, le costume, le jeu de scène est une recherche de singularité pour me rapprocher de ce qu’il y a de plus pur en moi. Et arriver sur scène en étant en amour avec ce qui a lieu.

On imagine souvent le clown nous faisons rire par ces pitreries. Lorsqu’on découvre Arletti on est surpris par sa sincérité. C’est cela qui nous touche et nous fait rire.

Est-ce cela être clown ?

Je travaille en ce moment, justement, avec de jeunes acteurs sur cette question de la recherche d’un être intérieur, vrai, d’après cette apparence extravagante, colorée, superficielle curieusement spectaculaire. Ce travail d’acteur est l’endroit de la transparence malgré une apparence, extraordinaire, colorée, superficielle curieusement spectaculaire.
Et le public, par empathie avec l’acteur qui ne ment pas sur ses sensations, est touché à son tour. Par un effet « miroir », il rit, sourit ou est ému comme si c’était de lui dont il s’agissait.

Pouvez-vous nous présenter votre prochain spectacle Le Concert ?

C’est la rencontre entre un musicien percussionniste, joueur de tablas Philippe Foch et Arletti. C’est un rencontre amoureuse. Elle veut l’amour, mais lui veut la musique. Ces 2 mondes cherchent à s’accorder. Et ce n’est pas toujours simple.
Philippe Foch était à la création de la compagnie et il connaît très bien notre travail. Nous avions le souhait depuis longtemps de travailler ensemble et François nous a réunis.
 

C’est votre 3^ème participation à Clowns not dead, que diriez-vous de ce festival ?

Le public a l’appétit d’être là. La salle est chaude. Nous on bénéficie de cette ambiance. On rentre dans des lieux qui sont habités.
 

Récemment vous avez animé une masterclass au conservatoire de TPM. Que souhaitez-vous faire passer aux étudiants ?

Qu’il est plus important de trouver l’acteur qu’on est, que de trouver son clown. Aller avec qui on est, le plus sincèrement possible, vers l’incarnation d’un personnage, pas avec ce qu’on sait faire.

Quand on est sur scène, toucher son personnage dans sa nature profonde et trouver en quoi ça fait écho en nous...Et Il faut prendre conscience de ce qu’on dégage.

Le théâtre c’est l’art de l’instant. On recommence à chaque fois. On en finit pas d’aller à la source…C’est plus un savoir être, qu’un savoir-faire.